1er Sommet Russie-Afrique, Sotchi, 23-24 octobre : La Russie entend renforcer une place encore mineure sur le continent

Avec ce 1er Sommet Afrique, les 23 et 24 octobre, la Russie entend promouvoir sa présence en Afrique et marquer avec ampleur son retour après le soutien de l’URSS aux luttes anticoloniales durant les années de guerre froide. Le président Poutine a d’ailleurs fait de ce passé une référence, insistant sur le lien fort qui l’unissait au continent africain, partageant entre eux le souci de défense du principe de souveraineté nationale.

Une volonté de présence pragmatique dans tous les domaines

Pour autant l’approche était pragmatique, axée sur l’intensification des échanges économiques et commerciaux, civils et militaires, les partenariats, la constitution d’alliances afin de peser davantage dans les instances décisionnelles au sein des institutions multilatérales, en particulier onusiennes. Les enjeux sécuritaires dont, en visée prioritaire, la lutte contre le terrorisme, s’inscrivaient aussi à l’ordre du jour.

Un forum économique Afrique-Russie accompagnait le Sommet, fort d’importantes délégations d’hommes d’affaires et de représentants de leurs structures d’appui, professionnelles et publiques.

L’ensemble des pays africains représentés aux plus hauts niveaux

Les 54 États africains ont répondu positivement, 43 conduits par leurs chefs d’État et de gouvernement et au total quelque 3000 participants.

Pour la Côte d’Ivoire, le Président Ouattara avait fait le voyage en compagnie de son épouse Dominique Ouattara, de membres du gouvernement, d’hommes d’affaires et des principaux groupements nationaux, CEPICI (Centre de Promotion des investissements), CGECI (Confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire), CCI…Parmi les secteurs priorisés : l’agro-industrie, l’énergie et les infrastructures.

Une intense diplomatie d’influence

Si aucun contrat majeur n’a été annoncé, le rassemblement a été propice à une intense diplomatie d’influence, confortant les positions prises par la Russie sur le continent. A noter que depuis 2017, une dizaine de présidents ont visité la Russie.

Un Sommet se tiendra dorénavant tous les 3 ans, tour à tour en Russie et dans un pays d’Afrique tandis que des rencontres annuelles seront organisées au niveau des ministres des Affaires Étrangères, entre d’une part la Russie et 3 États Africains, en fonction des rotations à la tête de l’Union Africaine.

Une présence économique encore faible dominée par les ventes militaires

La place de la Russie en Afrique reste cependant encore loin derrière celle des partenaires historiques de l’Afrique dont la France dans tous les domaines, politique, économique, culturel, sécuritaire. Par rapport aussi aux nouveaux venus, comme la Turquie, le Maroc, l’Inde et encore plus, évidemment, la Chine.

Ses échanges commerciaux sont mineurs et très déséquilibrés : ses exportations en 2018 ont atteint 17,5 milliards USD, en faible progression hors blé et produits d’hydrocarbures, avec seulement 3 milliards USD d’achats, dégageant un excédent en sa faveur de 14,5 milliards USD (chiffres International Trade Center). Pour comparaison, l’excédent de la Chine la même année n’a été que de 6 milliards USD alors que ses échanges ont totalisé près de 200 milliards USD. D’autre part, deux pays, l’Algérie et l’Égypte, absorbent une grande partie de des échanges bilatéraux.

En outre ses ventes sont essentiellement militaires : la Russie a été le principal fournisseur d’armes des pays d’Afrique subsaharienne, selon le Sipri (Institut International de Recherche sur la Paix de Stockholm). Elle a représenté de 2014 à 2018 près de 30% des achats de toute l’Afrique subsaharienne. En incluant le Maghreb, le continent compte pour 15% des ventes militaires russes. Cette dynamique, liée en partie à la recherche de nouveaux partenaires du fait des sanctions économiques, s’explique aussi par la nécessité de sécuriser des positions sur des territoires riches en métaux rares nécessaires à son industrie et dont elle est insuffisamment pourvue. Aussi certains contrats obtenus dans le nucléaire, le gaz, les infrastructures énergétiques sont directement dépendants des accords militaires avec notamment quelques pays, notamment l’Égypte, le Kenya, le Nigeria, le Mali, l’Angola et, le plus important, l’Algérie.